Le vernissage

Qu’il soit traditionnel à la gomme laque ou plus moderne de type nitrocellulosique, polyuréthane ou polyester, le vernis à deux fonctions : protéger les bois et embellir l’instrument.
Un vernis de qualité doit néanmoins répondre à plusieurs critères afin de ne pas altérer la vibration des bois.

 
 

Le vernis est l’une des dernières étapes de la fabrication de la guitare. D’une manière assez générale, les luthiers vernissent la caisse de la guitare indépendamment du chevalet et parfois même le manche indépendamment du reste de la caisse lorsque la méthode de fixation du manche le permet. Dans ce domaine comme dans d’autres en lutherie, plusieurs types de méthodes coexistent.

Les vernis modernes du fait de leur mode d’application au pistolet, déposent sur la surface à vernir un film de vernis assez épais. Ce poids excessif est néfaste à la vibration des bois et influe sur les modes vibratoires de l’instrument en apportant une rigidité supplémentaire. La dureté de ces vernis, bien que limitant l’émission du son, se révèle être un atout d’un point de vue de la résistance de la surface aux rayures et aux frottements, qui à l’usage érodent les vernis traditionnels à la gomme laque. Une guitare d’étude dans les mains d’un jeune guitariste sera mieux protégée par un vernis moderne et restera belle plus longtemps.

En ce qui concerne la guitare de concert, tout doit être optimisé et pensé de manière à privilégier l’acoustique de l’instrument. Chaque détail à son importance. Bien qu’il soit possible de travailler à la main un vernis au pistolet assez fin et léger, les vernis modernes les plus fins sont déjà au moins 3 fois plus épais que les vernis à la gomme laque appliqués au tampon. 30 heures de travail réparties sur 1 mois sont nécessaires à l’application d’un vernis au tampon correspondant au plus haut standard de qualité. La profondeur et la chatoyance naturelle ne trouvent pas d’équivalent et un tel vernis réalisé à la main permet d’obtenir un glassi parfait.

 

Gomme laque Asta.

 
La gomme laque, principal constituant des vernis au tampon, est originaire des forêts du Sud Est de l’Asie, notamment d’Inde et de Thaïlande. Elle est fabriquée à partir des sécrétions fondues, raffinées puis pilées, du coléoptère Coccus lacca. On la trouve sous forme de paillettes que l’on dissous dans de l’alcool éthylique .

 

La préparation du vernis.

 
Il s’agit de dissoudre de la gomme laque dans de l’alcool éthylique à 99 %. Je prépare un mélange de 200 g de gomme laque Astra (transparente) pour 1L d’alcool.

 

Le tampon.

 
Le tampon est confectionné avec un morceau de tissu de coton de 10 cm de côté, dans lequel on place une boule de mèche de coton. Le tissu est ensuite refermé sur la mèche de coton pour former le tampon.
 

Le remplissage.

 
Avant le vernis, la surface doit être préparée. Les porosités sont comblées au moment de la première étape dite de : « remplissage »ou « boucheporage ». Une poudre de pierre ponce est déposée sur la surface et un tampon chargé d’alcool et de quelques gouttes de vernis permet, par des mouvements circulaires, de polir la surface en se chargeant de fines poussières de bois, créant ainsi une pâte que l’on dépose dans les pores en appuyant fermement sur le tampon. Une fois toutes les porosités comblées, on attend le séchage complet pour poncer l’excédent.

 

Les premières couches de vernis.

 
Le tampon est chargé du mélange d’alcool et de gomme laque. J’effectue des mouvements répétés dans le sens du fil avec un tampon assez humide pour déposer un film de vernis uniforme sur la surface. La guitare est mise de côté quelques heures et après un léger ponçage l’opération de vernissage est renouvelée. Il est à noter que la position du chevalet sur la table ainsi que la touche sont protégés avec un adhésif de masquage.
 

La charge.

 

Lorsque les bois sont suffisamment isolés par la première impression de vernis, on commence alors à charger, c’est à dire donner progressivement de l’épaisseur au vernis. Pour cela, on dépose sur le tampon une goutte d’huile de vaseline afin de permettre au tampon de glisser sur la surface sans accrocher sur le vernis fraîchement déposé. Le tampon est alors plus sec que pour l’étape précédente et dépose un film de vernis si fin qu’il sèche instantanément après le passage du tampon.

Les mouvements effectués avec le tampon sont alternativement circulaires, en forme de huit et s’allongent à mesure que le tampon sèche et que l’on exerce une pression de plus en plus forte pour niveler la surface.
 

Le polissage.

 
Lorsque le vernis à suffisamment d’épaisseur, on réduit progressivement la quantité de vernis dans le tampon tout en ajoutant plus d’alcool. Une goutte d’huile est déposée de temps en temps sur la surface et le tampon doit être de plus en plus sec pour polir le vernis.

 

L’éclaircissage.

 
La dernière étape du vernissage permet d’enlever les traces d’huile qui restent à la surface et achève de polir le vernis. Le tampon est alors chargé uniquement d’alcool et on effectue des mouvements rapides dans le sens du fil du bois. Après quelques jours de séchage, je reprends le polissage avec une « popotte » : produit contenant un abrasif fin pour donner le brillant final.
 
 
Sylvain Balestrieri
Luthier