L’outillage du luthier

 

Il existe un lien passionnel entre le luthier et ses outils. Parfois créés sur mesure ou bien adaptés pour mieux correspondre à un besoin spécifique, les outils ont une histoire, une âme et se transmettent entre générations. Mon père et mon grand-père vivent à travers certain d’entre eux.

 
 

L’éclairage

 

Scialytique.

 
Il est primordial pour le luthier de travailler dans une pièce bien éclairée. Une bonne lumière naturelle est idéale et permet l’examen attentif des surfaces en cours de travail. Associée à plusieurs rampes de néon bien disposées et un scialytique (système d’éclairage utilisé dans les salles opératoires), la lumière est au besoin plus focalisé, l’œil guidant la main sans effort.

 

L’hygrométrie


 
Une guitare acoustique est constituée de bois d’épaisseurs relativement faibles. C’est parce qu’elle est ainsi construite qu’elle est sensible à la vibration de la corde. Mais ces faibles épaisseurs la rendent vulnérable aux variations hygrométriques, les surfaces en contact avec l’air étant importantes. Lorsque le bois perd de l’humidité, il se rétracte. Lorsqu’il en absorbe, il gonfle.?Cette expansion et rétractation du bois est à l’origine de la majorité des problèmes que la guitare peut rencontrer.?

Afin de prévenir les dommages liés à l’humidité relative, L’hygrométrie de l’atelier est régulée entre 40 et 50 % et à une température de 20°C. ?
Un hygromètre disposé dans chaque pièce de l’atelier permet de faire ce contrôle et un humidificateur rééquilibre le taux d’humidité relative dans l’air et tout particulièrement l’hiver si on chauffe ou l’été si on climatise.

 

Les moules


 

Chaque Luthier développe une approche individuelle du procédé de fabrication. Le montage du manche par exemple implique par le type de méthode choisie l’emploi de moules différents :
A l’espagnole : Les éclisses s’encastrent dans le manche au début de l’assemblage de la caisse.
A la française : Le manche est rapporté sur la caisse en fin de construction.
 

Moule d’éclisse.

 
Les éclisses sont mises en forme puis stabilisées dans le moule.
 

Moule

 
Les éclisses sont rassemblées par deux tasseaux en haut et en bas de la caisse. L’ensemble est maintenu dans le moule jusqu’au collage de la table et du fond pour conserver la forme.
 

Les outils de mesure


 

Mesure d’épaisseur d’une table d’harmonie.

 
Des mesures d’épaisseur de la table sont prisent en différents points avec le comparateur d’épaisseurs pour guider le travail
 

Mesure de flexibilité d’une table d’harmonie.

 
Avant de procéder au rabotage de la table, une mesure de la déformation en compression est prise en plaçant un poids sur la position du chevalet. Cette mesure mais aussi le calcul de la densité permettent de déterminer l’épaisseur de la table.
 

Prise de mesure d’un chevalet.

 
En cours de fabrication, les contrôles d’épaisseur sont très fréquents. Ici on mesure la hauteur du chevalet avec le pied à coulisse.
 

L’outillage à main


 

Les ciseaux à bois et gouges.

 
De largeurs et rayons de courbure différents, les ciseaux et gouges sont toujours parfaitement aiguisés pour un travail précis.
 

Les racloirs.

 
Des racloirs de formes et tailles différentes permettent d’effacer les traces des outils de coupe (gouges, ciseaux, rabots). Ils sont aussi indispensables à des ajustements fins avant de procéder au ponçage final.
 

Raclage des éclisses.

 
Les filets d’éclisses sont affleurés au racloir.
 

Scies Japonaises.

 
Japonaise Dozuki, Kataba, à onglet, à chantourner, avec ou sans avoyage, etc... Les scies sont nombreuses dans l’atelier. A chacune sa tâche.
 

Rabots.

 

Les rabots noisettes.

 
Ici aussi les tailles et formes varient beaucoup. Tandis que les plus grands sont dédiés à la réalisation des joints de table et de fonds ou bien au dressage des éclisses, les plus petits sont employés pour la finition de la filetterie, des barrages etc...
 

Rosace.

 
Le rabot noisette (20 mm de long) affleure les filets de la rosace sur la table d’harmonie.
Sa semelle est bombée pour ne pas marquer la table.
 

Ajustement des barres de fond.

 
Les barres de fond sont ajustées en hauteur, arrondis et affinées avec un petit rabot

 

Les machines outils


 

la raboteuse/ dégauchisseuse.

 
L’équipement en machines d’un atelier de lutherie est le même que celui d’un atelier d’ébéniste. Scie à ruban, scie circulaire, raboteuse, dégauchisseuse permettent de réaliser les débits à partir de madriers de sections plus ou moins importantes. Ici on rabote une touche.
 

La scie à ruban.

 
La scie à ruban, principalement utile au débit des bois permet ici de déligner un manche. A gauche de la photo des blocs d’acajou du Honduras ont été préparés pour le stockage.

 

L’outillage spécialisé


 

La cintreuse.

 
Le cintrage des éclisses est traditionnellement réalisé avec un fer à cintrer. Néanmoins, la plupart des ateliers modernes sont équipés aussi de cintreuses électriques. Elles permettent une mise en forme plus rapide des éclisses et la possibilité de maintenir l’éclisse en position sur le moule à une température déterminée.
 

Outils pour le frettage

 
De nombreux outils sont nécessaires pour réaliser un frettage et particulièrement en restauration puisqu’il faut s’adapter à tous types de situations. On peut voir au premier plan : des limes à frettes au diamant, limes tiers-point. Au second plan de gauche à droite : une tenaille, pince à cintrer, pince à gaufrer, 2 pinces à découper les pieds de frettes. En arrière plan :un outil à cintrer les frettes, 2 pinces à presser les frettes, un outil à limer les pieds de frette, des cales à poncer de différents radius ( rayons de courbure)
 

Les outils pour le frettage.

 
Inventé par Bob Taylor, fondateur des guitares Taylor, le frett buck est un dispositif destiné à absorber les vibrations dû au martelage des frettes dans la touche. Ainsi, il est plus aisé d’insérer les frettes, en particulier après la 12ème case. Ici on refrette une guitare flamenca Conde Hermanos 1963
 

Le Frett Buck.

 
La filière affine progressivement l’épaisseur des filets. Elle permet de réaliser la mosaïque de la rosace, les filetteries de caisse. Les filets sont travaillés jusqu’à 0,15mm d’épaisseur.
 

La fillière.

 
La presse parallèle à double vis maintient la guitare en position verticale ou horizontale pour travailler en particulier sur les éclisses. Deux mors en liège épousent les galbes de la table et du fond. Ici on réajuste le renversement du manche d’une Martin de 1870.
 

La presse paralelle.

 
Les serre-joints dans l’atelier sont nombreux. En acier ou en bois, de longueurs et profondeurs différentes ils doivent répondre à tous les besoins de l’atelier. Un marbre de contrôle (planéité 0,02mm) est utile pour faire certains collages. On peut voir présentés dessus, quelques serre- joints pour le collage de chevalets et la restauration de fractures de table.
 

Les serre joints.

 
La légèreté des serre-joints en bois est souvent recherchée lors de collages délicats. Ici, la restauration d’une Friederich dont la table est fracturée.

 

Guitare Daniel Friederich 1968.

 

Sylvain Balestrieri
Luthier